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Après le remarqué Fragments, la chanteuse-auteure-compositrice Grazzia Giu nous revient avec un album somptueux, libre, qui ignore les frontières et procède de l’impérieuse nécessité de se faire entendre.
Grazzia Giu entretient un lien très singulier avec les mots. Elevée dans un environnement d’une effrayante rigueur par un père italien et une mère flamande, elle n’eut, enfant, guère le droit de s’exprimer. De l’italien, elle ne connut que les brutales remontrances du père, du flamand l’absence de dialogue avec la mère, comme si au sein d’une famille bouleversée par la violence, elle n’était pas la bienvenue.
L’anglais, celui de sa grand-mère, résidant à New York fut alors son refuge ; cette femme merveilleuse, qui chaque année débarquée d’Amérique, venait inonder de soleil et de musique un sombre quotidien. Les microsillons d’outre-Atlantique, de Frank Sinatra, Dean Martin, Tom Jones furent alors de précieux exutoires. Le français deviendra plus tard la langue de l’amour et de son pays d’adoption.
C’est pour faire entendre enfin une voix jusqu’alors contrainte au silence, que Grazzia Giu se tourne vers la musique, et cela nous donne de précieuses clés pour appréhender cette
voix sans âge, qui jamais ne semble se soucier de plaire, chante parce qu’elle le doit ; une démarche artistique vitale qui nous touche en plein cœur.
Bright Darkness, titre-oxymore de ce nouvel opus, fait - on l’imagine - allusion à la recherche d’une luminosité à travers la musique qui fut cruellement absente de la construction de sa signataire.
Après une étincelante première rencontre avec le directeur artistique multi instrumentiste Daniel Yvinec, Grazzia Giu, qui s’était persuadée qu’elle avait gravé avec Fragments son dernier opus, retrouve la nécessité de nous parler encore et reprend le chemin des studios. C’est cette fois sur un répertoire plus personnel encore, plus mature et plus
ambitieux qu’elle va s’exprimer. Des chansons profondes, libres, parfois étranges, qu’on pourrait placer quelque part entre Stephen Sondheim, Tom Waits, Gershwin et Bacharach, portées par une expression à la fois brute, subtile, toujours sincère, et qui ne s’interdit aucune audace.
Le processus artistique, inhabituel, n’est pas étranger à la singularité de ce précieux opus.
Pour mieux capter la sensibilité à fleur de peau de Grazzia, Yvinec a suggéré une première session acoustique en duo avec le pianiste italien Nico Morelli, cueillant ainsi l’essentiel, le battement de cœur de l‘album. A ce diamant brut, il fallait offrir un écrin.
Naviguant des claviers à la batterie, des percussions à la contrebasse, le producteur a imaginé une sorte de mise en scène, créant merveilleux reliefs et étonnant paysages sonores.
Proposition artistique unique et intemporelle, Bright Darkness procède de la nécessité et exprime sans fard la vie et le monde.